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Hommage à François Mathey (X61), un grand chimiste polytechnicien

Presse

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16/12/2020

Ancien élève de l’École polytechnique et figure importante du Département de chimie, François Mathey nous a quitté la semaine dernière. Duncan Carmichael, chercheur CNRS au sein du Laboratoire de chimie moléculaire, revient sur les principales étapes de sa carrière, un parcours exemplaire et inspirant.


Né en 1941, François Mathey a été un chimiste engagé dès son plus jeune âge. Il entre à l'École polytechnique (X1961) et, après l’obtention de son diplôme, rejoint l'Institut de Recherche en Chimie Appliquée où il soutient sa thèse en 1971. Intitulée "Contribution à l'étude des hétérocycles carbone-phosphore pentagonaux", cette thèse, dense et très argumentée, a posé les fondements d'une carrière exceptionnelle. Après un passage à la jeune "Société nationale des poudres et explosifs" où il s’est forgé une réputation internationale importante dans le domaine des nouveaux composés organophosphorés, il est entré au CNRS comme Directeur de recherche. En 1986, il est retourné à l'École polytechnique, où il est devenu Président du Département de chimie.


François Mathey


Motivé, motivant et compétitif, il avait un sens de l’humour discret et caractéristique. Guidé par une aversion forte pour ce qu'il appelait souvent la "paléo-chimie", il était résolument attaché à l’innovation synthétique. Cette volonté d’innover lui a permis de construire à l’École l’un des plus prestigieux pôles de chimie du phosphore au monde. Parmi les travaux remarquables de son laboratoire, on peut citer la chimie contrôlée des phosphinidènes singulets (avec Angela Marinetti, puis Hoa Tran Huy), les composés du phosphore pour la chimie des matériaux, qui ont beaucoup influencé ce domaine (avec Claude Charrier, Eliane Deschamps, Nicole Maigrot, François Mercier et Louis Ricard), des développements majeurs dans la fonctionnalisation et la chimie de coordination des analogues phosphorés du benzène (avec Pascal le Floch, assisté ensuite par Nicolas Mézailles), et dans les métallocènes de métaux de transition intégrant du phosphore dans leurs cycles (avec Duncan Carmichael, Bernard Deschamps, Serge Holand et François Nief).

François Mathey a quitté Polytechnique en 2003 car son âge ne lui permettait plus d’exercer son rôle de Directeur du Laboratoire. Fier parisien dans l'âme, il a alors surpris ses collègues et amis en s'installant à l'Université de Californie (Riverside), où il a rejoint le laboratoire de son collègue pionnier du phosphore, Guy Bertrand. Plus tard, en 2008, il a également accompagné par son soutien, son énergie et ses connaissances formidables le Département de chimie de l'Université de technologie de Nanyang (Singapour), alors en plein essor. 

Les titres de François Mathey, dont ceux de "Membre de l'Académie des Sciences" et "Académicien étranger de l'Académie des Sciences de Chine", montrent l'estime que lui porte la communauté académique. Mais ils ne donnent qu'un aperçu de l'homme. Il était cultivé, charmant et son sens du relationnel lui a rendu de grands services, tant comme Président de la Société Française de Chimie au moment de son intégration dans le réseau des Sociétés européennes de chimie (2000-2003), qu’en tant que Rédacteur en chef du Bulletin de la Société Chimique de France, Heteroatom Chemistry, et des Comptes Rendus de l'Académie des Sciences, Série II C. Il a également été très apprécié dans la sphère internationale. Sa présence très respectée et de longue date au sein du comité directeur de l'influente "International Conference of Phosphorus Chemistry" a été marquante ; il a également créé l'un des premiers Master internationaux d'Europe et a joué un rôle essentiel dans la fondation du "Laboratoire des Matériaux Organophosphorés Fonctionnels et Catalyse" dans la province du Henan, à Zhengzhou, où il était également professeur. 


François Mathey était Chevalier de la Légion d'honneur et Officier de l'Ordre des Palmes Académiques. Il a publié plus de 600 articles, beaucoup décrivant des avancées avant-gardistes en chimie, avec un indice H (quantifiant la productivité et l’impact scientifiques) impressionnant qui dépasse 55 à l’heure actuelle.

La chimie du phosphore a perdu un grand ami, et l'une de ses voix les plus charismatiques et les plus éloquentes.


François Mathey (1941-2020 ; X 1961)

Membre de l'Académie des Sciences (1998),
Chevalier de la Légion d'honneur (2001),
Président de la Société Française de Chimie (2000 à 2003),
Académicien étranger de l'Académie des Sciences Chinoise (2011).
Directeur de Recherche de Classe Exceptionnelle au CNRS
Professeur à l'École polytechnique
Professeur distingué à l'Université de Californie, Riverside
Professeur à l'Université technologique de Nanyang
Professeur à l'Université de Zhengzhou.

Prix (sélectionnés) :

Médaille d'argent du CNRS (1979),
Prix Paul Langevin de l'Académie des Sciences (1985),
Prix Gay-Lussac Humboldt (1987),
Prix Grignard-Wittig de la Société Chimique de France (1997),
Prix international Arbuzov pour la chimie des organophosphorés (2001),
Prix de l'amitié du gouvernement chinois (2009),
Commandeur de l'Ordre des Palmes Académiques (2018).



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